La druidesse haïssait les braconniers. Ces mécréants étaient toujours prêts à faire du mal pour un peu de fourrure ou un peu d'argent. Mais, auparavant, elle n'avait pas vraiment eu de ressentiment contre eux. Elle savait qu'ils existaient, bien sûr, elle n'était pas bête a ce point ; mais se dire que des fous tuaient des animaux pour de l'argent, dans d'atroces souffrances lui était impossible a imaginer. Son esprit pur ne sombrait pas encore dans la décadence.

Mais, quand elle arriva au Haut-Perchoir, un vent de panique souffla dans son esprit. Elle parla à un taurène le plus proche, oubliant sa répulsion de la Horde un instant. Contre eux, il étaient unis.

Mais quand le monstre, deux fois plus grand qu'elle commença à parler, a moitié en sanglots, elle s'enerva, et partit seule. Il y avait des gens qui pleuraient face à ce genre de choses, qui ne faisaient rien d'autre et appellait a l'aide.

Et il y en avait d'autres qui tuaient.

La jeune druidesse se retrouva face à un spectacle désolant. Des braconniers de toute races malmenaient des petites créatures dont elle ne connaissait pas l'espèce. Ils les mettaient dans des filets pour mieux les immobiliser, puis les tuaient de sang froid.   « Des bébés ! »

Elle s'accorda encore quelques secondes pour lever la tête. Depuis tout a l'heure, elle entendait des battements d'ailes furieux. Des adultes, qui ressemblaient aux bébés, semblaient fous de colère et voulaient arrêter les braconniers. Des coursiers du vent. Ces bêtes énormes, qui servaient de montures à la Horde, avec une queue de scorpide et un corps de lion. Elle étaient impressionnantes, et leurs petits étaient plus mignons qu'elle ne l'aurait imaginé. Ces pauvres chous, avec leurs grands yeux lumineux qui appellent à l'aide, et leurs petites ailes. Non, elle avait trop tardé. Elle allait rendre justice aux coursiers du vent. Ce soir, le ciel sera rouge du sang des lâches, des mécréants. Elle eut, pour la première fois, ce petit sourire sadique qu'elle allait exhiber pendant toute sa besogne, tandis qu'elle se transformait en un félin bleu furieux. La druidesse était une changeforme douée.

Non.


Elle ne reussit pas a tous les tuer. Elle en eut une partie, mais ils étaient trop nombreux. Qu'aurait-elle pu faire ? Elle avait perdu la bataille. Ils avaient tué Shurgaal dans la mêlée, Shurgaal, son petit bébé chat... Les pertes étaient grandes de leur coté, mais du sien aussi. Elle avait perdu un ami, un confident que personne ne remplacera. Pourquoi l'avait-il suivie ? Il allait droit à la mort. Ce chaton avait un problème dans sa tête.

Pour la peine, elle en avait tué une dizaine d'autres. Mais il étaient encore beaucoup. Elle ne reussira jamais seule à assouvir son désir de vengeance. Elle avait reussi a libérer un coursier des mailles entravantes d'un filet spécialisé. Et depuis la fin de la bataille, il essayait de s'envoler pour rejoindre ses parents dans le ciel, ses parents innaccessibles. Mais ses petites ailes étaient tellement fines qu'il ne pouvait monter dans les airs. Il voyait ses parents, là haut, mais ne pouvait pas les rejoindre. C'était si cruel...

Pauvre bébé.

La druidesse le prit dans ses bras, avec une délicatesse peu commune de sa part. Il était tellement mignon, avec ses grands yeux et ses petites ailes. Elle se mit a le bercer, doucement, en fredonnant de sa voix rauque quelque chose ressemblant à une berceuse. Il lui semblait que l'animal s'endormait ; Elle en était heureuse. Il ronronnait presque, quoiqu'elle ne sache pas si les Coursiers du vent ronronnaient... Peut être qu'elle imaginait le petit son continu, qui temporisait sa chanson au rythme de la respiration du bébé ? Ou peut être était-ce elle même qui ronronnait ? Dans ces cas là, il faudrait qu'elle fasse attention, cela voudrait dire que c'est le félin qui est en elle qui commence a prendre le contrôle. Quoique, savoir ronronner, c'est bien. Elle s'en souciera plus tard.

Il faudra qu'elle tue d'autre braconniers. Tous les braconniers, rien que pour ces jolis yeux lumineux et cette bouille d'ange. Et qu'elle amène d'autre personnes, pour l'aider, car elle ne pourra pas le faire toute seule...



Mais au fait ! Qu'est-ce que ça mange, un Coursier du vent ? Il doit avoir faim...